2021 12-1 Feb Issue Number Profiles

Rencontrez votre voisin: Gontran Bolduc

Par Joël Weiner

Gontran Bolduc est un enfant du Saguenay. Jeune, il aidait son père dans toutes sortes de travaux, notamment dans la construction d’’une maison. Il ne le savait pas encore, mais il a acquis, ce faisant, des habiletés qui lui serviront ultérieurement. En effet, 30 ans plus tard, ses talents acquis à l’adolescence lui permettront de restaurer la première de plusieurs maisons de la Basse-Ville et de s’’adonner à un passe-temps autant agréable que lucratif.

Gontran travaillait au ministère fédéral des Communications à titre de spécialiste des radiofréquences. Il décida de quitter la ville de Québec pour s’installer à Gatineau avec sa famille en 1985 puis de s’’installer seul à Ottawa en 1992. Avec les fonctionnaires de la ville, il s’impliquait dans  la préservation du patrimoine bâti (Patrimoine/Heritage Ottawa). On parlait alors de la perte de plus en plus fréquente de veilles maisons. On  rapportait ces pertes dans les journaux mais le problème continuait. C’est alors qu’il a dit, « Il faut les acheter, les restaurer et les louer. » Ses propos n’ont pas trouvé d’enthousiasme au comité. 

’’Il prit donc la décision de passer de la parole aux actes. Il emménagea au 195, rue Cumberland. Il s’agit de la maison Rathier (1862), du nom de son propriétaire d’origine qui vivait à l’arrière de la maison et qui tenait une boutique à l’avant.

La maison Rathier (1863) fut la première que j’ai achetée. Son état était lamentable. Il m’aura fallu huit (8) ans pour la restaurer. Je travaillais le jour au fédéral et le soir à sa restauration. Je demeurais au rez-de-chaussée-de-chaussé et louais l’étage pour être capable de financer les travaux.

Pour un homme avec un budget limité, à la recherche d’un logement bon marché, la maison Rathier était toute une trouvaille mais, en contrepartie, elle était en fort mauvais état. Il y emménage tout-de-même, se retrousse les manches et pose la première pierre de ce qui deviendra son patrimoine.

« Son état était lamentable, » Gontran se rappelle. « Il m’aura fallu huit ans pour la restaurer. » Il travaillait le jour au fédéral et le soir à sa restauration et demeurait au rez-de-chaussée et louait l’étage pour être capable de financer les travaux. 

Ses efforts ont porté fruit., Gontran se rend compte qu’il prend plaisir à restaurer des bâtiments historiques et que cela génère même des petits profits. Donc, en 2000, 8 ans après l’acquisition de la maison Rathier, il devient propriétaire d’une autre propriété qui, elle aussi, remonte au milieu du XIXe siècle. Il s’agit de la maison Foisy (1860), du nom du ferblantier qui en fut le premier occupant. (La façade de la maison secondaire de Foisy est exposée au Marché By, sur un mur dans la cour entre les rues York et Murray.

 « Cette maison aussi était en mauvais état » dit Gontran. « La caisse populaire avait repris la maison et elle était à vendre, mais personne ne voulait l’acheter. Les sans-abris l’avaient récupérée, puis abandonnée. Lorsque je l’ai visitée, il n’y avait que quelques chats qui courraient à l’intérieur. La caisse populaire m’a dit :  « Si tu l’achètes, ne nous demande pas de la financer.» J’ai dû hypothéquer la maison Rathier pour l’acheter et payer la caisse. Ma fille et mon garçon sont venus m’aider. Je pense que cette expérience les a influencés tous les deux. »

La maison Foisy (1863) fut la seconde que j’ai achetée. Son état était pitoyable. La caisse avait repris la maison, elle était à vendre mais personne ne voulait l’acheter. Les sans abris l’avait récupéré, puis abandonné. Lorsque je l’ai visité, il n’y avait que quelques chats. La caisse populaire me dit “ si tu l’achète, ne demande pas de la financer”. J’ai du hypothéquer la maison Rathier pour l’acheter et payer la caisse populaire.

Le risque et les efforts ont finalement porté fruit, et ce de deux manières. Premièrement, la fille de Gontran est maintenant propriétaire des deux maisons et elle en occupe une. Deuxièmement, la Ville d’Ottawa a reconnu l’excellence de la restauration de la maison Foisy par la remise d’un Prix d’Excellence, en 2010, présenté par le maire Larry O’Brien. On y lit, « Ce prix récompense la restauration minutieuse de la façade avant et des éléments intérieurs de la maison Foisy, un bâtiment désigné de la Basse-ville construit en 1860. »

Gontran a mis ses travaux de restauration « sur pause » quand il a rencontré Rosi Kohn, qui était venue à Ottawa de Calgary. Ils se sont vus pour la première fois lors d’une fête de quartier sur la rue Bruyère. Quelque temps plus tard, Gontran emménage chez Rosi, devant l’historique caserne de Pompiers numéro5, et, évidemment, ils l’ont achetée lors de sa mise en vente en 2001.

« La caserne fut un poste de pompier, puis le centre communautaire Armand-Pagé, » explique Gontran. « La ville l’a vendue car sa maintenance devenait trop dispendieuse. Il a eu une première vente à la famille Cloutier, puis je l’ai achetée. Son état était passable, la rénovation par le précédent propriétaire avait été interrompue, elle devait reprendre. J’en ai pris charge. J’ai fait une recherche aux Archives du Canada pour retrouver les plans originaux, puis j’ai reconstruit le parapet avec l’aide de mon garçon qui est maçon. »

Aujourd’hui, l’ancienne caserne de pompiers est la résidence de Gontran et de Rosi, et elle a repris sa place comme point de repère dans la Basse-Ville, même pour les piétons et les automobilistes qui circulent sur l’avenue King-Edward. En fait, elle est plus qu’une simple résidence. Les propriétaires y ont accueilli différents événements, notamment le tournage de 3 films et plusieurs expositions de peintures et de bijoux, pour venir en aide à des artistes émergents. L’aide aux artistes ne s’arrête pas là. Gontran a aussi siégé, pendant plusieurs années, au conseil d’administration de la Nouvelle Scène et il a été président de la compagnie de théâtre La Catapulte. L’ancienne caserne a également été un lieu de réunion du Magnetic North Theatre Festival.

Le projet suivant de Gontran était de restaurer la maison Archambault de 1875. C’était un duplex aux 221 et 223 rue St-Andrew quand il l’a achetée en 2005. « Je prenais ma retraite de la fonction publique et je devais avoir un projet significatif », dit Gontran. « Elle était aussi en très mauvais état et la restaurer demanda 18 mois et beaucoup de connaissances et d’énergie. » Évidemment, comme vous le voyez sur les photos, le résultat est impressionnant.

En 2016, Gontran et Rosi ont acheté la propriété au 231, rue Bruyère. « Je l’appelais la maison la plus laide du voisinage », dit-il. « C’était le genre de propriété qui, lorsque tu ouvres un mur, tu découvres encore plus de travaux à faire. Ce fut la dernière que j’ai restaurée avec l’aide de mon garçon et de ses amis. Maintenant, c’est le temps de me reposer. J’en profite pour remercier ceux qui sont venus m’aider. Je ne serais pas rendu où je suis sans leur support.»
All photos contributed by Gontran Bolduc